ÉCHOS

Critique

16 janvier 2020
Paru dans L’Obs. Par Jacques Nerson

Pascale Roze retrouve sa voix

En 1996, le prix Goncourt fut, à la surprise générale, décerné au Chasseur Zéro, de Pascale Roze. les jurés prenaient un risque en couronnant le premier roman d’une jeune inconnue. Leur choix fut d’ailleurs critiqué, l’influence de Marguerite Duras y était si criante ! Mais on ne devient pas en un jour ce qu’on est. Non seulement Pascale Roze a survécu à cette consécration imprévue mais elle s’exprime à présent dans sa tessiture propre. D’une voix douce mais prenante. Pourquoi touche-t-elle autant, cette Hélène, prof de littérature à Sciences-Po (l’auteure a elle-même animé de nombreux ateliers d’écriture en banlieue), qui s’imagine avoir fermé boutique depuis la mort de son mari mais renoue malgré soi avec l’amour ?

Cela vient sans doute de ce qu’ici les descriptions sont indirectes. Seul le pourtour des personnages et sensations est effleuré. Pascale Roze se contente de réunir de petits faits dépourvus de tout commentaire, sans jamais enfler le ton. On dirait que, comme son héroïne, le cri lui est inconnu. L’émotion s’insinue dans le cœur du lecteur et l’étreint sans qu’il y prenne garde. On ne s’en aperçoit qu’une fois pris par ce récit d’une extrême sensibilité.